[Ciné] Critique : The Birth of a Nation

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Attention, sujet dangereusement épineux. The Birth Of A Nation n’est pas seulement un film militant, grave et violent. Il est la réponse, 100 ans après (101 ans très exactement) à l’un des films les plus controversés de l’histoire, autant chef-d’œuvre que brûlot raciste d’un des 3 pères du cinéma, David Wark Griffith. En œuvre homonyme de The Birth Of A Nation, Nat Parker s’y oppose de manière frontale, pour mieux le phagocyter tout en prenant le risque de raviver les tensions raciales, en particulier aux USA et son contexte difficile, d’autant plus marqué par l’ère Trump. N’est pas génie qui veut, et Parker ne parait armé que de son politiquement correct en étendard. Assez pour faire vaciller un mythe ?

Trente ans avant la guerre de Sécession, Nat Turner est un esclave cultivé et un prédicateur très écouté.
Son propriétaire, Samuel Turner, qui connaît des difficultés financières, accepte une offre visant à utiliser les talents de prêcheur de Nat pour assujettir des esclaves indisciplinés. Après avoir été témoin des atrocités commises à l’encontre de ses camarades opprimés, et en avoir lui-même souffert avec son épouse, Nat conçoit un plan qui peut conduire son peuple vers la liberté…

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S’il est sans nul doute un film marquant, The Birth Of A nation est d’un classicisme décevant dans sa construction et dans sa technique. Beaucoup d’envolées emphatiques à coups d’artifices, de chants bien sentis, mais finalement peu de génie dans cette œuvre gonflée à l’émotion. Cru, sans concession, très personnelle, mais qui n’amène pas autre chose qu’un défonçage de portes ouvertes sur l’esclavagisme, esclavagisme dont notre œil actuel peinerait à justifier l’idée même. Ainsi on ne dépasse jamais le manichéisme, ni pour l’homme blanc ni pour l’homme noir, l’un toujours bon l’autre mauvais. Reste que l’œuvre veut prendre aux tripes et le réussit plutôt bien, on ne ressort pas totalement indemne de la projection, à défaut d’en sortir changé. Tout ici nous pousse à l’évidence, tout ici est critique de l’esclavagisme, tout ici parait réfléchi, de manière intelligente mais sans doute trop consensuelle. Le film reste toujours dans une trame presque prévisible.

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S’appuyant sur une histoire vraie, on saluera le travail prenant encore ici à contre-pied l’œuvre de Griffith qui fantasmait son histoire Américaine à coup de race sacré et mythologique. Néanmoins, Parker aurait sans doute dû se restreindre à l’exactitude historique la plus stricte. Il s’en approche bien sûr, mais laisse la porte suffisamment ouverte. Vu avec le recul historique comme le prototype de l’illuminé religieux, le personnage de Turner est dépeint ici avec la progression classique du héros vengeur, à peine plus, occultant par exemple ses meurtres de femmes et d’enfants. On ne comprend ainsi plus bien, à la fin du film, quel est le message véhiculé, tant celui-ci oscille sans cesse entre offre consensuelle et présentation dérangeante de l’histoire. Le prendre en message de paix parait excessivement difficile, le prendre au premier degré (affrontement manichéen entre blancs et noirs) parait trop simpliste. Ainsi ce film semble toujours entre deux eaux, complexité aussi affolante que l’histoire Américaine d’une part, rapport millénaire des peuples de l’autre.

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Le fait est que The birth Of A Nation est un film entier, viscéral, plein, mais pourtant classique et pas assez développé, qui de fait ne pourra totalement convaincre, du moins pas sans casse. Si son propos, tel que décrit ou sermonné par son réalisateur, est empreint d’humanisme, celui-ci est loin d’être évident et l’impact qu’il risque d’avoir pourrait être tout autre. Les affaires personnelles de son auteur, la dimension excessivement Manichéenne des choses, tout cela risque d’en faire (et cela est déjà le cas) un film qui divise. A voir néanmoins, absolument, ne serait-ce que pour se rappeler que l’homme, si horrible soit-il, n’est parfois que le reflet de son temps, que l’horreur ne se voit que dans les yeux de celui qui le juge.

 

Date de sortie : 11 janvier 2017

Durée : 1h 50min

De : Nate Parker

Avec : Nate Parker, Armie Hammer, Penelope Ann Miller

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