Un remake de Disney ! L’année débute par un torrent d’originalité pour un monstre de cinéma qui n’a jamais été aussi rentable, puissant et en manque d’idées (toute ressemblance avec Apple serait fortuite).
Entre un univers Marvel peinant de plus en plus à faire exister ses films en tant que simples films, et son catalogue Disney qui sera pour la quasi intégralité de ses grands noms entièrement remaké, l’avenir peut de prime-abord s’avérer bien plat, à défaut d’être calme. Cendrillon avait été un semi ratage, Le livre de la Jungle un remake assez intéressant, pourquoi La Belle et La Bête ne continuerait pas dans cette dynamique ? Culte pour certains (loin d’être mon préféré), ce dessin animé s’inscrivit à l’époque dans ce qu’on appellera le second âge de d’or de Disney, emboîtant le pas de la Petite Sirène dans des longs métrages très ambitieux. Une Emma Watson en tête de proue, le compositeur de l’original reprenant du service, et pourquoi pas ?
Fin du XVIIIè siècle, dans un petit village français. Belle, jeune fille rêveuse et passionnée de littérature, vit avec son père, un vieil inventeur farfelu. S’étant perdu une nuit dans la forêt, ce dernier se réfugie au château de la Bête, qui le jette au cachot. Ne pouvant supporter de voir son père emprisonné, Belle accepte alors de prendre sa place, ignorant que sous le masque du monstre se cache un Prince Charmant tremblant d’amour pour elle, mais victime d’une terrible malédiction.
Soyons franc, on ne peut rien reprocher de particulier au film, si ce n’est que le manque de prise de risque est omniprésent. Quelques différences mineures sont là, mais le film ne se rapproche pas plus du roman qu’il adapte. Paradoxalement, il ne semble pas non plus vouloir s’en émanciper, ce qui est étrange.
Petit aparté à ce niveau, La belle et la bête est un conte planqué au milieu du recueil « la jeune Américaine et les contes marins » écrit par Gabrielle-Suzanne de Villeneuve en 1740. Cette histoire est considéré comme la première version moderne d’un conte-type dont on ne connait pas vraiment les origines. Les autres versions du conte, parfois apocryphes, souvent bien trop éloignés de l’univers Disney, auraient difficilement leur place dans une telle adaptation. Ce dernier point peut être pondéré , et je ferai un aparté dans l’aparté, nombre de contes (Blanche-Neige, Rox et Rouky, La belle aux bois dormants, Le bossu de notre dame, etc) sont adaptés en mode lance-flammes édulcorant, du fait de matériaux d’origine aux histoires excessivement malsaines et aux fins presque invariablement sordides (La Belle au bois dormant, non pas réveillé par un baiser mais violée dans son sommeil par le prince, m’a définitivement passé l’envie de comprendre l’origine une telle adaptation). Si l’on regarde tous les contes adaptés, cette belle et la bête moderne est un sujet assez subtil, prenant çà et là des codes de l’amour idéalisé, le saupoudrant de manichéisme mais le dosant subtilement, développant particulièrement bien son histoire et quelques petits raccourcis, mais toujours subtilement.
Fin de l’aparté et explication de la légère surexploitation de l’adverbe « subtilement ». Si je devais considérer le film, au dire du réalisateur, comme une adaptation de l’œuvre originale, je la considérerais comme passant à côté de son sujet, ou au mieux bien trop simplifiée, occultant totalement des passages et éléments brillants du conte et sa vraie force. Disney force toujours le trait et non la profondeur, livrant chaque élément sur un plateau, sans subtilité donc. Tout n’est pas noir pour autant, certains apports sont très bénéfiques, et l’objet filmique implique forcément des modifications.
Reste que, toute mauvaise adaptation de la Belle et la Bête qu’elle puisse être, elle n’en demeure pas moins un bon film, plaisante car rythmée et visuellement magnifique. De même, l’utilisation des espaces, notamment lors des scènes musicales, est maîtrisée de bout en bout. Petit plus : le méchant de l’histoire est sans doute le plus réussi de la mégacorporation Disney-Marvel-Star Wars depuis des années, identifiable comme à la fois sympathique et pourtant parfait connard irrattrapable (un des archétypes du bon méchant en somme), ce qui est un peu triste pour les deux dernières licences citées. L’univers ne cache pas son manichéenne, ce qui est sombre est TRÈS sombre, ce qui est lumineux est TRÈS lumineux, ce qui est joyeux l’est d’autant plus, la vision du village Français à la Disney vaut toujours son pesant de camembert.
J’aimerais dire qu’Emma Watson porte le film, mais celle-ci donne malheureusement l’impression de jouer à bâtons rompus face aux éléments 3d et de rester ancrée dans sa zone de confort pour le reste, ce rôle de Belle étant presque trop évident. Pas une mauvaise prestation, loin de là, mais pas de quoi la porter aux nues face à des monstres comme Emma Thompson, Ian McKellen, ou encore Luke Evans en Gaston impérial.
Pour qui ? Les amoureux (et ils sont nombreux) du dessin animé, qui s’ils n’espèrent pas plus qu’une version live seront définitivement aux anges. Disney maîtrise et verrouille, ne laisse pas de place au doute et très peu à l’interprétation, en dit sans doute trop peu ou pas assez dans les thématiques qu’il aborde, mais ne déçoit jamais les enfants, grands comme petits, et réussi parfaitement dans cette optique.
Pour les autres tout dépend. En le prenant comme un simple film, isolé, il reste un excellent divertissement, beau et agréable, assez touchant et pas bien méchant, pas inoubliable mais qui réchauffera votre petit cœur.
Pour les allergiques ou les lassés de l’univers Disney, je n’aurais rien de mieux qu’une citation de Lisa Simpson (ep 3 saison 6) pour ne pas me fâcher avec eux : « Le romantisme est mort. Il a été racheté par Disney lors d’une OPA hostile, aseptisé puis revendu parcelle par parcelle. »
Date de sortie : 22 mars 2017
Durée : 2h 14min
De : Bill Condon
Avec : Emma Watson, Dan Stevens, Luke Evans
BONUS ! Voici 2 photos de la conférence de presse avec le cast 🙂
Je n’avais pas été fan de la version Live du Livre de la Jungle ta critique me donne un peu d’espoir en cette relecture de l’univers Disney
Surtout quand on sait que le Roi Lion est le prochain !