Un bar, de la bonne mousse, de la bonne musique, un désir exaucé pour nous spectateurs aux rêves simples par l’ami Felix Van Groeningen. Pur exemple de cinéma indépendant n’ayant aucune leçon à donner mais beaucoup de choses à apporter, Belgica suit les pas du très bon Alabama Monroe et de La Merditude Des Choses dans une expérience unique.
« Jo et Frank sont frères, et comme souvent dans les familles, ces deux-là sont très différents. Jo, célibataire et passionné de musique, vient d’ouvrir son propre bar à Gand, le Belgica. Frank, père de famille à la vie bien rangée et sans surprise, propose à Jo de le rejoindre pour l’aider à faire tourner son bar. Sous l’impulsion de ce duo de choc, le Belgica devient en quelques semaines « the place to be… »
Faire de grands films est une chose, mais s’approprier un style, une patte, y retrouver son identité est déjà admirable en soit. Le cinéma de Van Groeningen est de ceux-là, il va plus loin que son postulat de départ, replaçant la musique au cœur de ses créations. Alabama Monroe était déjà construit ainsi, Belgica reprend ces codes pour les amener à un degré supérieur… peut-être trop loin, pour un film s’avérant facilement aride. De fait, l’ensemble est construit plus comme un documentaire que comme un film classique, la forme est étrange, assez simple dans sa technique et pourtant intelligente et originale.
C’est un cinéaste qui ne se laisse pas dompter facilement. De changements de rythmes en changements de tons, Belgica s’accroche à sa formule pour une expérience totale, viscérale, toujours caméra au poing, n’usant jamais d’exagérations visuelles, s’imposant dans sa forme la plus basique. Bémol pourtant, la succession presque désarticulée de scènes en cycles épate dans un premier temps, berce, puis fini par s’épuiser, suffisamment pour se dire que l’expérience s’étire un peu trop en longueur. Encore moins « grand public » qu’Alabama Monroe, Belgica ne s’adresse ni aux amateurs de cinéma popcorn, ni à celui qui voudrait y tirer une morale, encore moins à l’amoureux des belles images.
La musique, centre avérée du film, sert de bande-son mais surtout d’univers. Hormis ses moments de trances le film parait vide, dans le sens réaliste du terme, dépeignant avec brio scènes gênantes ou horizons déprimants du plat pays. Le vide et le calme alternent avec l’ambiance bondé et musicale du bar. Ce côté-là est irréprochable et l’investissement de l’auteur est total, tous les groupes présents dans le film ayant été montés pour l’occasion.
Au milieu de la musique se loge une brochette d’acteurs convaincants dans lequel le duo de frangins surnage largement, l’un et l’autre évoluant lentement vers un dénouement trop rapide, presque décevant tant la montée en puissance est bien amenée. Gestion du temps justement, qui au final reste le talon d’Achille du réalisateur.
Racontant brillamment une histoire sans y chercher de sens profond, Belgica réussit pourtant son pari et y perdra immanquablement du monde. L’expérience déroute tant l’image s’efface devant le son, et c’est en cela qu’il marque sa différence.
Date de sortie : 2 mars 2016
Durée : 2h 07min
De : Felix Van Groeningen
Avec : Tom Vermeir, Stef Aerts, Hélène De Vos
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